Lutte contre Boko Haram, la société civile appelle à l’humanisation du conflit
Dans la lutte contre Boko Haram au Cameroun, plusieurs Organisations de la société civile (OSC) appellent au respect de la protection des droits de l’Homme. Une lettre adressée au Président de la République dénonce la barbarie engendrée par la guerre contre la secte islamique Boko Haram.
Le Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac), l’organisation les Nouveaux droits de l’Homme Cameroun (Ndh) et l’Os-Humanitaire, trois organisations de la société civile de défense des droits de l’Homme adressent une lettre au Président de la République afin de dénoncer la barbarie et l’inhumanité entraînée par la guerre contre Boko Haram.
Fort conscient de la nécessité de mener une guerre contre le terrorisme et la secte Boko Haram, ces groupes de défense des droits de l’Homme déplorent la barbarie, les abus, l’injustice et l’inhumanité qu’engendre cette guerre.
Ces organisations ne comprennent pas cette incohérence entre la déclaration de guerre du Président de la République contre Boko Haram, un acte de souveraineté qui sous-entendait l’inscription du conflit au statut de guerre avec belligérance et forcément application des différentes conventions liées au droit international humanitaire dont le Cameroun est Etat-partie.
Or, certains faits dont la gravité a été mise en exergue par leurs organisations et consignés dans les rapports d’Amnesty International témoignent d’une certaine inhumanité dans ce conflit.
Près de 130 personnes n’ont toujours pas été retrouvées jusqu’à ce jour. Dans des opérations de ratissage, de bouclages de villes menées par l’armée camerounaise en 2014, 50 personnes au moins avaient trouvé la mort dans le local où elles avaient été enfermées. 25 autres sont mortes dans le local de la gendarmerie de Maroua. 45 ont été transférées à la prison de Maroua. L’identité et les causes de leur décès et les lieux de leur sépulture n’ont pas été communiqués aux familles.
Ces cas ont été relevés à Magdeme et Double, deux localités de l’Extrême Nord Cameroun à proximité de la frontière avec le Nigeria. Ces cas ont notamment fait l’objet de deux rapports, le premier « Cameroun, les droits humains en ligne de mire. La lutte contre Boko Haram et ses conséquences de septembre 2015 » et le second, « Bonne cause, mauvais moyens : atteintes aux droits humains et à la justice dans le cadre contre Boko Haram au Cameroun de juillet 2016 ».
Le rapport 2016 d’Amnesty International révèle que dans une opération en date du 19 novembre 2016, l’armée camerounaise a mené des perquisitions et des arrestations dans la localité de Bornori, village suspecté d’abriter un camp d’entraînement de Boko Haram. L’opération s’est soldée par 7 homicides illégaux et des actes de torture. Les autorités n’ont mené aucune enquête sur ces allégations.
Dans leur lettre adressée au Président de la République, les organisations internationales souhaitent entre autre la mise en place d’une commission d’enquête indépendante et inclusive. Ces organisations déplorent que dans le cadre de cette lutte contre Boko Haram, le Cameroun soit en train de glisser de la présomption d’innocence à la présomption de culpabilité. Des directives doivent être prises afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur l’impératif du respect des droits et libertés fondamentaux aussi bien en temps de paix qu’en temps de guerre.